J’ai toujours été plus intéressé par la suggestion que par l’exposition.
L'œuvre FETISH n'est pas née d'un désir de représenter le corps érotique, mais d'une question : qu'est-ce qui rend une chose érotique ? Où se situe la frontière entre sentiment et symbole, entre corps et geste, entre silence et intensité ?

Dans FETISH , vous ne trouverez pas de nudité. Vous n'y trouverez rien d'ouvertement sexuel au sens conventionnel du terme : pas de peau, pas de courbes, pas de regard qui demande à être interprété. Et pourtant, c'est l'une des œuvres les plus sensuelles que j'aie jamais créées.
Pourquoi?
Car l'érotisme ne se résume pas nécessairement à ce que l'on voit, mais à ce qui est implicite, restreint, chargé. Et souvent, il s'agit de contrôle. Dans FETISH , j'ai travaillé sur plusieurs niveaux de métaphores : des textures qui lient, des éléments qui restreignent, des formes qui se répètent avec une tension presque rituelle. Le visage est immobile, détaché, mais quelque part dans la structure de l'œuvre, on ressent l'attraction. La retenue. L'exigence silencieuse de se soumettre ou de résister.
Je voulais créer un portrait qui ne séduit pas par l’évidence — mais par l’atmosphère.
Le genre de pièce qui chuchote, au lieu de crier.
Le mot « fétiche » lui-même est porteur d'une histoire complexe – de l'exotisme colonial aux reliques religieuses en passant par la culture kink moderne. Je ne suis pas ici pour résoudre cette histoire. Je m'intéresse à exploiter la tension du mot. Sa façon de osciller entre révérence et tabou. Entre objet et obsession. Entre sacré et empreinte de tension.
Il y a un thème récurrent dans mon travail : l’ absence de performance. Le sujet ne se présente pas. Il ne sourit pas. Il n’explique rien. C’est particulièrement vrai dans FETISH . L’expression est neutre, illisible. Et cette neutralité devient une forme d’érotisme à part entière : un refus de donner ce qu’on attend.
La tension réside dans ce qui n’est pas montré.

Il n'y a pas d'objet de désir évident dans cette œuvre. Pas de critères de beauté classiques. Mais il y a de la texture. J'ai peint des matériaux qui paraissent tendus, étouffants, ornementaux, voire cérémoniels. Des choses qui s'accrochent – non pas comme un amant, mais comme un rituel. La forme même de l'œuvre devient un fétiche – quelque chose de tenu, de vénéré et jamais pleinement compris.
Je pense que mon refus de représenter la nudité explicite dans cette œuvre vient en partie d'un désir de me réapproprier le langage visuel du désir. Pour me rappeler (et rappeler au spectateur) que l'érotisme n'est pas toujours une question d'exposition. Parfois, il s'agit d'intimité. Du silence pesant entre ce qui est montré et ce qui est caché. De la façon dont la suggestion touche plus profondément que la visibilité.
Je souhaite que mon travail laisse des traces, et non des réponses. Il doit inciter les gens à s'attarder dans cet espace liminal entre attirance et analyse, désir et distance.
Le fétichisme n'est pas une question de sexe. Il est question de pouvoir, de répétition, de silence et des étranges façons dont nous donnons du sens à la métaphore. Il s'agit de la profondeur avec laquelle la suggestion peut nous émouvoir, et de sa puissance lorsque le corps n'est pas exposé – mais omniprésent , dans sa texture, sa forme et son intention.